Quand le design rencontre le réemploi.

Vous le savez, chez Donnons.org, nous sommes convaincus que le réemploi a un rôle immense à jouer dans la transition écologique, qu’il est un vecteur de solidarité inégalable et un formidable outil de création de lien social. Dans cette rubrique « Ils donnent d’eux-même », nous allons à la rencontre de personnes engagées, qui partagent cette conviction et qui la font vivre au quotidien. Nous allons à la rencontre de ceux qui font, ceux qui créent et qui imaginent le monde de demain, et surtout, ceux qui utilisent le réemploi autrement.

Il y a quelques semaines, une notification Instagram attire notre attention : “Laurie Ferreira vous a mentionné en story.” Curieux, on clique. Et là, on plonge dans l’univers inspirant de Laurie, designer d’intérieur et formatrice, passionnée par le réemploi. Forcément, chez nous, ça fait mouche. Intrigués par sa démarche créative, on lui propose une interview pour en savoir plus sur la place que Donnons occupe dans son quotidien professionnel.

Basée dans le Sud-Ouest, entre Pau et le Pays Basque, Laurie a fait du don et du “do it yourself” un véritable art de vivre. Le réemploi ? Chez elle, c’est une évidence… et une source inépuisable d’idées.

Laurie a découvert Donnons.org en 2011 lorsqu’elle était étudiante. Une petite table attire son attention. Parfaite pour son premier studio. Depuis, elle a pris l’habitude d’utiliser régulièrement Donnons.org. Côté récup’, Laurie prend le temps de chiner, de dénicher le meuble ou l’objet de déco qui l’inspire, celui qu’elle pourra transformer, revisiter, réinventer. En revanche, ce qu’elle donne, ce sont surtout des vêtements et jouets que ses enfants n’utilisent plus. Une manière simple et naturelle de prolonger la vie des objets, à chaque étape.

"Donner des histoires"​

Après plus de 14 ans à donner et récupérer des objets grâce à Donnons.org, on s’est dit qu’elle devait sûrement avoir quelques anecdotes à partager. Évidemment, on espère un petit moment croustillant. Et Laurie ne nous a pas déçus. (Bon, on lui avait envoyé les questions à l’avance, il faut dire.)

Il y a huit ans, un monsieur avait posté une annonce pour donner une couverture qui avait tapé dans l’œil de Laurie. Elle entre en contact avec lui et quelques échanges plus tard, elle se rend avec son conjoint chez ce monsieur. Trois heures plus tard, la nuit tombée, elle ressort de là, les bras chargés d’objets hétéroclites… et surtout, la tête pleine d’histoires.

Ce qu’elle a vécu ce jour-là, elle le résume en une expression qui nous frappe : « Donner des histoires. » Oui, c’est probablement aussi ça, Donnons.org : on y va pour un objet, et parfois, on en repart avec bien plus. Le monsieur en question vidait sa maison. Chaque objet avait son passé, son anecdote, sa petite part de vie. Et ce monsieur avait bien l’intention de raconter ces histoires, de prendre son temps, de partager un moment ensemble.

Elle se souvient encore, en reconnaissant ses goûts parfois “décalés” (on cite !), d’une lampe au pied sphérique démesuré, recouvert de coquillages. Un objet improbable.

Un canapé, trois propriétaires

On lui demande également quel objet l’a le plus marqué. Laurie nous parle d’un canapé, qu’elle aurait trouvé il y a quelques années à Bordeaux, à plus de deux heures de route de chez elle. Mais on l’a compris, Laurie est déterminée.

Elle loue une remorque, et se rend sur place pour récupérer ce canapé. C’est probablement le plus bel objet qu’elle ait récupéré, même si elle l’avoue, il ne faisait pas l’unanimité. On lui demande une photo, mais malheureusement, ce canapé étant devenu trop petit pour accueillir sa famille grandissante, elle l’a à son tour donné. Ce canapé en est à son troisième propriétaire, et peut-être plus, qui sait ?

Un cache pot peut en cacher un autre

À l’origine, on voulait surtout parler DIY, alors on recentre un peu la discussion.  On demande à Laurie ses astuces pour détourner ou transformer un objet récupéré. Elle sourit : pour elle, tout commence par une question simple mais essentielle : et si cet objet avait une autre fonction ? Quand elle cherche une suspension pour un luminaire, elle ne se limite pas au rayon “luminaires”. Elle explore toutes les catégories, sans a priori. Un cache-pot en rotin ? Un simple trou au bon endroit et il devient abat-jour. Des cintres en bois ? Ils se transforment en élégants porte-affiches.

Selon Laurie, la seule véritable limite de la seconde main, c’est notre imagination. Chaque objet peut vivre mille vies,  à condition de savoir le regarder autrement.

Le réemploi, une réponse durable au défi écologique

Quand on lui demande pourquoi le réemploi, Laurie ne tergiverse pas. C’est avant tout une évidence, en parfaite cohérence avec ses convictions personnelles : réduire au maximum son empreinte carbone. Mais c’est aussi une quête de qualité, celle d’objets bien conçus, fabriqués avec des matériaux nobles et durables, capables de traverser les années sans faillir.

Aujourd’hui, cette qualité se fait rare… ou devient hors de portée pour beaucoup. Laurie en est bien consciente : dans son métier, le budget reste souvent la première préoccupation de ses clients. Refaire une cuisine en bois massif, par exemple, représente un investissement bien plus conséquent que d’opter pour des meubles de grande distribution.

Mais ce surcoût peut être compensé ailleurs, grâce au réemploi. Intégrer des éléments déjà utilisés sur d’autres postes permet d’équilibrer le budget global. Et au final, c’est toute la rénovation, cuisine, mobilier, aménagement, qui gagne en durabilité.

Le réemploi dans le design : effet de mode ou vraie prise de conscience ?

Aujourd’hui, Laurie met un point d’honneur à toujours proposer à ses clients des solutions de réemploi dans leur projets de rénovation. C’est devenu une priorité. Mais on ne peut s’empêcher de l’interroger sur l’ampleur réelle du phénomène. Est-ce que le réemploi est en train de devenir la norme, ou reste-t-il une niche ?.

Pour elle, la tendance est bien là : de plus en plus de gens aiment chiner, écumer les brocantes, dénicher la pièce unique, celle qui donnera du caractère à leur intérieur. Mais à côté de cette dynamique sincère, elle observe aussi un phénomène moins réjouissant : le greenwashing des grandes marques. Certaines surfent sur la vague du durable, mais la réalité est tout autre. Il faut savoir qu’en 2022, près de 1,3 million de tonnes de déchets d’ameublement ont été collectées par la filière REP (l’organisme en charge de ce type de déchets), soit 18,7 kg par habitant. Et seulement 3% ont été réemployés ou réutilisés. On est encore loin du compte…

Comment s'assurer qu'un projet de rénovation soit durable ?

La mode, par définition, est éphémère. Et c’est justement ce que Laurie cherche à éviter. Pour elle, un intérieur ne doit pas simplement être « tendance », mais profondément en accord avec la personne qui y vit.

C’est pourquoi elle pose beaucoup de questions à ses clients, parfois déroutantes, voire un peu inattendues. Par exemple : « Quelle est votre couleur préférée ? »
Un détail, en apparence. Et pourtant, elle remarque que cette couleur est souvent absente des logements avant rénovation. Pourquoi ne pas lui redonner sa place ?

Laurie défend une approche centrée sur l’humain. Elle veut comprendre les vraies envies, les goûts, la personnalité de chacun. Et surtout, elle évite de commencer par la fameuse question : « Montrez-moi ce que vous aimez. »
Parce qu’elle sait qu’il est difficile, pour quelqu’un qui n’est pas du métier, d’exprimer clairement ses préférences. Et que dans ce flou, la mode a vite fait de s’imposer… au détriment des vrais besoins et attentes.

Pour suivre Laurie et voir son travail, c’est par ici : 

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