
Le contexte
Plus d’un an après son adoption par l’Assemblée nationale en mars 2024, la proposition de loi portée par la députée Horizons Anne-Cécile Violland visant à « réduire l’impact environnemental de l’industrie textile » est étudiée en début de semaine par le Sénat, avant un vote prévu le 10 juin.
La loi anti fast fashion entend freiner la course à la mode bon marché et éphémère. En ligne de mire : les géants du textile comme Shein ou Temu, accusés de saturer le marché avec des milliers de nouveaux produits chaque jour, à bas coût et au détriment de l’environnement.*
Ce que contient la loi
La proposition de loi introduit une définition légale de la fast fashion, basée sur la quantité produite, la vitesse de renouvellement des collections, la faible durabilité des produits et l’absence d’incitation à la réparation. Les entreprises concernées devront informer les consommateurs sur l’impact environnemental de leurs vêtements.
Le texte prévoit des pénalités financières de quelques euros pour les vêtements ayant un fort impact négatif sur l’environnement, selon le principe du pollueur payeur. Mais un désaccord oppose l’Assemblée, qui veut les indexer sur le score environnemental d’un vêtement, et le Sénat, qui préfère des critères de durabilité et de pratiques commerciales, afin de cibler plus précisément l’ultra fast fashion (Shein, Temu) sans pénaliser les marques européennes.
Initialement, la proposition portée par Anne-Cécile Violland incluait une mesure inédite : interdire la publicité pour les marques de fast fashion. Cette disposition a finalement été écartée lors de son passage en commission au Sénat, en raison de craintes liées à sa conformité constitutionnelle. À la place, les sénateurs suggèrent d’interdire aux influenceurs de promouvoir ces marques sur les réseaux sociaux. De son côté, le gouvernement envisage de relancer le débat sur une interdiction plus large, en parallèle de celle concernant les influenceurs, avec l’intention de laisser le Conseil constitutionnel statuer en dernier ressort.
Une loi vidée de sa substance d'après les associations
Le recentrage du texte inquiète la coalition Stop Fast Fashion, qui regroupe 14 ONG comme Emmaüs, France Nature Environnement ou Les Amis de la Terre. Elle craint que la loi ne perde son effet dissuasif et devienne une simple coquille vide. Dans ce contexte, Les Amis de la Terre et l’Observatoire des multinationales ont saisi la HATVP (Haute Autorité pour la transparence de la vie publique) pour qu’elle enquête sur les activités de lobbying de Shein, qu’elles accusent d’irrégularités.
Après son adoption au Sénat, la proposition de loi devra être examinée par une commission mixte paritaire, chargée de trouver un compromis entre les versions votées par les deux chambres. Avant l’ouverture des débats, Sylvie Valente-Le Hir, rapporteure au sein de la commission du développement durable, a exprimé sa volonté d’aboutir à un texte à la fois efficace et rapidement opérationnel.